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Position des gouvernements nationaux vis-à-vis de l’Otan

03/06/2024

Étude réalisée par Inès Girardot-Champsaur, chargée de mission au sein de l'observatoire des alliés de la France dans l'Otan de l'Institut d'études de géopolitique appliquée. 



Critères employés

  • Europe de la défense : soutien à une politique d'autonomisation stratégique de l'Union européenne, afin qu'elle soit à terme indépendante pour assurer sa défense. Cela impliquerait notamment une stratégie commune, des fonds communs et des armées mutualisées.
  • Autonomie industrielle : achat de matériel militaire prioritairement au sein de l'Union européenne, pour favoriser la production dans l'espace européen et le rendre, à terme, autonome industriellement pour assurer sa défense.
  • Revalorisation de l'UE au sein de l'Otan : volonté de conférer un poids plus important au pilier européen de l'Otan, notamment par le biais de la diplomatie interinstitutionnelle,. Il s'agit en définitive d'une volonté d'autonomie plus grande de l'Union européenne sans pour autant se détacher de l'Otan.
  • Approfondissement et renforcement de l'Otan : soutien à une politique de renforcement de l'intégration et des capacités de l'Otan. Cela implique une augmentation des capacités militaires et de leur interopérabilité, une augmentation des budgets alloués à la défense, une concertation accrue entre pays alliés, l'instauration de fonds commun pour certains enjeux spécifiques et un renforcement des partenariats avec les autres organisations internationales.
  • Atlantisme : soutien à une alliance militaire axée autour des États-Unis, par opposition à la recherche d'une certaine indépendance vis-à-vis de l'hégémonie américaine.

Méthodologie employée

L'étude est circonscrite aux positions de la France, de l'Allemagne, des pays d'Europe centrale, baltique et nordique. Les cinq catégories retenues ont vocation à représenter les cinq principaux axes selon lesquels se positionnent les gouvernements nationaux vis-à-vis de l'Otan. La question de l'autonomie de l'Union européenne est l'enjeu principal pour les pays membres à la fois de l'Otan et de l'Union, ce pourquoi un critère ayant trait à l'ambition de construire une Europe de la défense a été choisi. La défense de l'Union européenne recouvre plusieurs dimensions, qui correspondent aux différents aspects de l'autonomie stratégique. Le premier critère traduit l'ambition politique générale de construire une Union européenne autonome en matière de défense. Ce critère s'exprime notamment dans les discours politiques de la part des dirigeants nationaux, mais aussi dans les textes officiels à l'instar des déclarations de politique étrangère et stratégies de sécurité nationale. Les accords multilatéraux entre pays de l'UE ont aussi été utilisés comme indicateurs.

L'autonomie en matière de défense recouvre également une dimension matérielle, c'est-à-dire une Union européenne dotée d'un fort réseau d'industries d'armement. Cette volonté s'exprime notamment dans le choix des pays depuis lesquels les alliés importent leurs armes. Les efforts pour acheter des armes et du matériel à des pays membres de l'Union européenne plutôt qu'aux États-Unis par exemple témoignent d'une volonté d'une plus grande autonomie. En l'absence de documents retraçant et comparant avec exactitude ces informations, la répartition des pays sur cet axe est notamment le fruit d'une observation des récentes commandes importantes, telles que relatées dans la presse ou des rapports officiels.

La question de l'autonomie de l'Union européenne en matière de défense va de pair avec la place de l'Union au sein de l'Otan. Certains pays, en raison de leur attachement tant à l'Union européenne qu'à l'Otan, ambitionnent de se positionner au sein des deux organisations de façon complémentaire et sans hiérarchisation. Cette ambition relève davantage de la diplomatie et de la concertation. Elle s'exprime de façon plus implicite dans les déclarations de dirigeants nationaux ou de dirigeants de l'Otan et elle est parfois analysée dans des travaux de recherches publiés par des revues scientifiques ou instituts de recherche.

L'approfondissement et le renforcement de l'Otan traduit une volonté d'augmenter les capacités de l'Alliance pour assurer une défense plus efficace. Le renforcement de l'Otan nécessite des investissements supplémentaires de la part des pays membres. Cette volonté s'exprime dans les discours des dirigeants nationaux, les stratégies de sécurité nationale, les déclarations de politique étrangère, les programmes politiques, les sites internet des ministères des armées nationales et des ministères des affaires étrangères. Le respect du critère otanien des 2% du PIB alloué à la défense est également un indicateur.

L'Otan est, enfin, historiquement liée à la puissance américaine, avec laquelle certains pays entretiennent des relatons ambigües. Cette étude tient dès lors compte de la proximité idéologique, diplomatique et culturelle des alliés avec les États-Unis, qui est une des composantes des positionnements nationaux vis-à-vis de l'Otan. L'évaluation de ce critère se fonde sur des accords bilatéraux et déclarations officielles mais aussi des analyses historiques et articles scientifiques en la matière.

En l'absence d'indicateurs quantitatifs, ces critères et leur évaluation sont le fruit d'une réflexion subjective. Il existe donc une marge d'erreur significative. Les informations utilisées sont parfois sujettes à interprétation, à l'instar des discours, textes et déclarations. Cela est accentué par le fait que pour la plupart de ces questions, les différences de positionnement relèvent pour beaucoup de la nuance et non nécessairement d'une divergence fondamentale. Les auteurs de ces sources ne sont pas identiques. Il peut s'agir d'un texte officiel publié et diffusé par les gouvernements mais aussi de déclarations improvisées faites par des membres des gouvernements, ou encore d'articles de presse. Le niveau d'information est donc différent. Il convient également de noter que des changements de gouvernement et de contextes nationaux ont eu lieu dans plusieurs pays ces dernières années, qui rendent difficile la compilation d'informations pertinentes et la comparaison. L'actuel chef d'État slovaque est par exemple au pouvoir seulement depuis quelques mois, comme le gouvernement finlandais, polonais, etc.

La compilation d'informations a été plus difficile pour certains pays : Croatie, République tchèque, Bulgarie et Slovaquie. Cela est dû au manque d'informations ou encore à l'absence de positions très claire sur le sujet.